Dire NON, c’est pas être faible, c’est être maître de sa vie

« Dire non à une vengeance stupide alors que la cité pousse à réagir à chaud. »

Dans la cité, y’a des règles. Elles sont pas écrites sur des murs, mais tout le monde les connaît. L’honneur, la famille, le respect. Si quelqu’un manque à l’un de ces codes, c’est une histoire qui finit rarement bien. Et surtout, on te demande jamais ton avis. Tu dois suivre le mouvement. Tu dois réagir.

Malik, c’est mon gars sûr. On a grandi ensemble, on traînait ensemble, on parlait de tout et de rien, mais surtout de tout ce qu’on voulait se construire plus tard. Il voulait que sa famille soit fière, il voulait pas tomber dans les mêmes pièges que d’autres. Mais quand ça touche à la famille, les principes s’effacent.

Sa petite sœur, une fille discrète, toujours dans son coin, un peu naïve peut-être, elle est tombée sur le mauvais mec. Un gars d’une autre cité, un mec qui savait parler, qui savait jouer avec les mots et les regards. Il l’a eue. Elle s’est attachée, elle a cru à leurs promesses, et lui, dès qu’il a eu ce qu’il voulait, il a disparu. Plus de messages, plus d’appels. Rien.

L’humiliation.

Dans la cité, une fille qui se fait avoir comme ça, c’est pas juste une histoire de cœur brisé. C’est une honte pour la famille. Les rumeurs partent vite, les messes basses font plus de dégâts que les poings. Et Malik, il pouvait pas laisser passer ça.

Je l’ai vu monter en pression, de la colère pure dans les yeux. Il voulait agir. Pas demain, pas la semaine prochaine. Maintenant. Un coup de fil, deux-trois potes qui chauffent l’ambiance, qui disent que ça se fait pas, que ça mérite une correction. Qu’il faut lui montrer ce que ça coûte de manquer de respect.

Et puis, y’a eu moi.

Il voulait que je vienne. Comme si c’était normal. Comme si c’était obligé. Comme si j’avais pas mon mot à dire.

J’ai refusé.

J’ai refusé, et tout de suite j’ai vu les regards changer. Comme si je les trahissais. Comme si je choisissais l’autre camp. Mais c’était pas ça.

C’était pas de la peur, c’était pas que je voulais défendre ce mec. Mais j’ai compris un truc ce jour-là : on t’apprend à rendre coup pour coup, mais personne te dit que la vraie force, c’est de savoir quand t’arrêter.

Si on le trouvait et qu’on lui mettait une patate, qu’est-ce que ça changeait ? Elle allait se sentir mieux ?
Si on lui cassait la gueule, est-ce que ça allait laver l’affront ? Ou juste en créer un autre ?

J’ai regardé Malik et je lui ai dit : « Frérot, si tu fais ça, c’est pas pour ta sœur. C’est pour ton ego. »

Il a serré les dents, il a voulu me répondre, mais y’a eu un blanc. Il savait que j’avais raison. Mais c’est dur d’aller contre la cité, contre les attentes des autres.

J’ai compris un truc ce jour-là : dire NON, c’est pas être faible. C’est pas baisser les yeux. C’est choisir son chemin.

Et parfois, le plus dur dans la rue, c’est pas de cogner. C’est de poser les poings.